Sy Savané: « Avec la fièvre Ebola, est-il normal que le président s’attribue 100.000 euros jour ? »
« Dans un pays frappé par la fièvre Ebola, est-il normal que le président s’attribue 100 000 euros jour et que les députés exigent 4×4 rutilants, salaires avoisinant les 5000 euros? » Dans le paysage politique embrouillé de la Guinée, la création réussie de l’O.R.E.P. (Opposition Républicaine Extra-Parlementaire) a semble-t-il, bousculé les partis « officiels » dans leur certitude.
Jusqu’à une date récente, la connivence implicite de certains de leurs leaders avec M. Alpha Condé leur assurait une situation de monopole dans l’espace politique du pays. Cette garantie n’est plus assurée. Les situations de rente politique craquent de partout, en raison des exigences justifiées d’une jeunesse désormais bien éclairée.
Les femmes, les jeunes et le peuple d’en bas (petits commerçants, mareyeuses, charbonniers, ferrailleurs, menuisiers, petits paysans, chauffeurs de taxis, etc….) qui constituent l’immense majorité de notre pays, réalisent de plus en plus que certaines notabilités « officielles » de l’opposition dite parlementaire, peut-être intimidées par le pouvoir, ou par naïveté, sont disposées à laisser brader notre pays et ses ressources minières, forestières, maritimes et foncières. Des affairistes venus de tous horizons, fusent sur notre pays comme un vautour fuse sur sa proie. Silence absolue sur ce phénomène comme s’il y avait quelque part, des connivences cachées. Les intérêts des oligarques ayant désormais la primauté sur ce qui peut profiter au plus grand nombre.
Dans ce contexte, nos compatriotes tournent donc leur regard vers l’O.R.E.P. en qui, ils sont susceptibles de placer leur confiance. Ils ne sont pas indifférents à la personnalité des fondateurs de ce mouvement. Bien au contraire, on peut même parler de regard bienveillant porté sur eux.
Toutefois, nos concitoyens, échaudés par les incohérences, les combines politiciennes sur leur dos, les abandons en rase campagne sur fond de prébendes en tout genre, sont dans une expectative. Intéressés par la démarche de l’O.R.E.P., ils attendent de voir, pour le moment. Car ils ne sont plus disposés à donner un chèque en blanc à qui que ce soit. Il n’est pas utile de décrire ici, la misère et l’insécurité généralisée qui se sont abattues sur nos compatriotes, alors qu’on leur promettait exactement l’inverse il y a plus de trois ans. Dans le même temps, une oligarchie minoritaire mais cruelle, se vautre dans l’abondance. Exemple : le président s’est fait octroyer une somme de 100.000 euros par jour au titre de « budget » de la présidence prétendument « voté » par un conglomérat de clans coopté, le C.N.T., alors qu’une assemblée nationale était déjà élue depuis plus de trois mois.
Dans un pays frappé par une maladie mortelle (fièvre EBOLA), où tout manque dans les hôpitaux, même une seringue, est-il normal qu’un seul individu, fût-il président de la république s’attribue sur les maigres deniers publics une pareille somme ? La même question peut être posée au sujet de nos « députés » qui exigent en plus des 4×4 rutilantes, des salaires avoisinant les 5000 euros mensuels (primes et autres avantages compris) dans un pays où le salaire moyen atteint rarement les 100 euros/mois.
Alors quelle est la place de l’O.R.E.P. dans le contexte qui vient d’être brièvement décrit ?
L’installation sereine, progressive mais indiscutable de l’O.R.E.P. dans la vie politique guinéenne a involontairement provoqué l’affolement de certains partis politiques et de leurs dirigeants. Sous le prétexte de combattre M. BAH Oury, que mes amis et moi-même avons choisi comme président de notre mouvement, il y a bien entendu le projet de combattre l’O.R.E.P. sans paraître le faire. Vieux procédé, archi connu en politique. On s’en prend aux têtes pour épargner la base afin de liquider en silence le mouvement qui inquiète. D’où selon moi, les outrances verbales, émaillées d’expressions désobligeantes, presque vulgaires à l’endroit de M. BAH Oury. Je suis de ceux qui ont décidé de le porter à la tête de notre mouvement. Mon intervention y a été décisive. Pour une raison simple, que bon nombre de Guinéens partagent avec nous : BAH Oury est une personnalité solide ayant une « épaisseur » indiscutable. Un patriote intellectuellement consistant et cohérent, viscéralement attaché à son pays, et pas aux fortunes qu’il pourrait en tirer pour lui-même, comme on le voit trop souvent dans la classe politique guinéenne. Sur ce plan, il gagnerait à être connu au-delà de notre pays. Voilà ce que nous, mes amis et moi-même, nous partageons avec BAH Oury.
Cela étant précisé, il faut d’abord rappeler ce qu’est l’O.R.E.P. à sa création, ensuite l’espace qu’elle entend occuper.
L’O.R.E.P. n’est pas un parti politique, mais un mouvement large, de nature politique, parce que, elle prétend accéder ou aider à accéder au pouvoir tout parti politique ou personnalité politique partageant ses positions et qu’elle estime avoir l’épaisseur de la fonction suprême. A l’O.R.E.P., nous pensons que les « élections », quelle qu’elles soient, ne peuvent en aucun cas préserver notre pays de la décomposition, si ce pouvoir devait perdurer. Car avec ce président, toute élection est d’avance gagnée, même si dans les urnes il est battu. Prétendre qu’on aurait une alternance en 2015 par la voie électorale, est tout simplement une naïveté coupable. A moins que ce ne soit une volonté délibérée d’abuser de nos compatriotes pour des fins autres. En effet, les Guinéens ont fait l’expérience plusieurs fois vécue de résultats proclamés sans rapport avec ce qu’ils ont voté dans les urnes. Et il y a peu de chance que le président coopté et ses clans oligarchiques, se convertisse subitement à un minimum de probité politique.
L’O.R.E.P. est un mouvement politique qui reçoit les personnalités indépendantes dont la probité est indiscutée, les partis politiques nationaux hostiles à tout tribalisme, régionalisme, tout sectarisme, religieux par exemple, et les associations (syndicats, O.N.G.). Notre adversaire n’est ni l’U.F.D.G., ni l’U.F.R., ni aucun parti existant, pas même le R.P.G., car les militants du R.P.G. sont des compatriotes comme ceux de GBAÏA, LOLA, BARO, KANKAN, PITA, LELOUMA, KINDIA, BOFFA, DINGUIRAYE, BENTY ou Boullivel….. En revanche, le pouvoir actuel est et reste un adversaire avec lequel aucune discussion n’est possible. Ceux des « leaders » politiques qui s’y sont risqués dans notre pays, réalisent aujourd’hui combien de fois ils se sont laissés flouer. Résultat : ils en sont à demander aux pays étrangers d’ailleurs gênés, qu’ils exigent de M. Alpha CONDE le respect de ses engagements, ou alors à implorer l’intervention de la mythique « communauté internationale ». En un certain sens, ils réclament d’être mis sous tutelle et la Guinée sous protectorat. Des « leaders politiques » sollicitant leur propre mise en esclavage « doux », mais esclavage quand même. Une première dans l’histoire de l’Afrique Noire. Il n’est pas anormal de demander une aide extérieure en cas de conflit. Mais l’aide extérieure ne doit être demandée que comme supplément de l’effort intérieur. Or cela n’est pas fait. D’où l’embarras de ceux dont l’appui a été demandé ici à Paris. Et la courtoisie de la socialiste Elizabeth GUIGOU relève plutôt du protocole traditionnel que d’une quelconque approbation.
C’est donc une erreur grave que de combattre l’O.R.E.P. comme si elle était au pouvoir. D’ailleurs certains hommes politiques, par exemple M. Lansana KOUYATE ont bien compris que nous menons le même combat : celui de récupérer le plus rapidement possible notre pays, avant qu’il ne soit trop tard. Et que, à un moment ou à un autre, nous aurons besoin les uns des autres.
En prônant la sérénité et le respect dû à M. BAH Oury, nous ne cherchons en aucune manière à éviter le débat d’idée. Bien au contraire, sur ce terrain, l’O.R.E.P. pourrait être le lieu où chaque parti politique viendrait s’alimenter. Et dans pas longtemps, je serai sur le terrain en Guinée pour y développer notre projet, et avec nos bases, désigner nos REFERENTS nationaux.
ROUEN (France) le 24 MARS 2014
Mamadou Billo SY SAVANE, Vice-président de l’O.R.E.P.