Ebola: l’inquiétude mondiale reste vive, le Nigeria appelle à l’aide
Le Nigeria, pays le plus peuplé d’Afrique, a fait appel samedi à des volontaires face à l’épidémie d’Ebola, qui a tué près de 1. 000 personnes en Afrique de l’Ouest et s’impose pour l’OMS comme une urgence « mondiale ». Avec 13 cas (confirmés, probables ou suspects) dont deux mortels, selon le dernier bilan de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), le Nigeria est le quatrième pays affecté. L’épidémie y reste limitée à Lagos, capitale économique et ville la plus peuplée d’Afrique de l’Ouest avec plus de 20 millions d’habitants.
Pour lutter contre la flambée, l’Etat de Lagos a fait appel aux volontaires, reconnaissant être confronté à un manque de personnel, deux jours après la levée d’un mot d’ordre de grève dans la santé publique. Le Nigeria a décidé d’accorder plus de 11,5 millions de dollars (plus de 8,6 millions d’euros) à la lutte contre l’épidémie et décrété vendredi l’état d’urgence sanitaire.
Pour épauler le pays, les Etats-Unis ont annoncé le renforcement de leur assistance en personnel et en matériel. Leur agence de développement (USAID) a promis d’allouer 12 millions de dollars (près de 9 millions d’euros) à la lutte anti-Ebola dans les pays affectés : Nigeria et surtout Guinée, Liberia et Sierra Leone, où l’épidémie a fait plus de 960 morts sur près de 1. 800 cas depuis le début de l’année.
Il n’existe pour l’instant aucun traitement ou vaccin spécifique contre cette fièvre hémorragique caractérisée par des hémorragies, vomissements et diarrhées, et provoquée par un virus qui se transmet par contact direct avec le sang, les liquides biologiques ou les tissus de personnes ou d’animaux infectés. Mais un anticorps expérimental, le « ZMAPP », jamais testé auparavant sur l’homme, a été administré à deux Américains infectés au Liberia, rapatriés et placés en isolement à Atlanta.
Un missionnaire espagnol rapatrié à Madrid devrait également en bénéficier. « Après que l’Agence espagnole des médicaments et produits sanitaires a autorisé l’importation exceptionnelle de ce médicament, le ZMAPP » est arrivé samedi soir à l’hôpital Carlos III où se trouve le prêtre de 75 ans, a annoncé le ministère de la Santé.
L’OMS, qui a qualifié vendredi l’épidémie d' »urgence de santé publique de portée mondiale », doit se réunir la semaine prochaine pour examiner l’éventualité d’utiliser le ZMAPP en Afrique de l’Ouest. Un traitement préventif contre Ebola mis au point par le laboratoire britannique GSK pourrait faire l’objet d’essais cliniques en septembre et si ceux-ci sont concluants, être disponible courant 2015, a de son côté indiqué Jean-Marie Okwo Bélé, directeur du département des vaccins et immunisation de l’OMS, dans un entretien samedi à la radio RFI.
– Situation ‘catastrophique’ à Monrovia –
Avant le Nigeria, le Liberia et la Sierra Leone avaient déjà décrété l’état d’urgence sanitaire. La Guinée réfléchit aussi à une telle mesure. Le pays, qui avait annoncé samedi après-midi la fermeture de ses frontières terrestres avec le Liberia et la Sierra Leone, est revenu sur sa déclaration dans la soirée.
« Il ne s’agit pas d’une fermeture des frontières entre la Guinée, le Liberia et la Sierra Leone, mais plutôt de mesures contraignantes visant à mieux contrôler les mouvements transfrontaliers, notamment ceux des personnes » susceptibles d’être porteuses du virus, a déclaré à l’AFP le porte-parole du gouvernement, le ministre Albert Damantang Camara.
« Si on dit que les frontières sont fermées, les mouvements de personnes vont se faire clandestinement à travers les villages ou par les maquis parce que de toutes les façons les frontières sont très poreuses », a affirmé de son côté le ministre guinéen de la Coopération internationale, Koutoubou Moustapha Sanoh.
En vertu de l’état d’urgence sanitaire, deux villes de l’est de la Sierra Leone – région devenue le nouvel épicentre de la flambée, Kailahun et Kenema, ont été placées en quarantaine et des lieux de loisirs ont été fermés dans le pays. Plus de 1. 500 policiers et militaires sont en cours de déploiement dans ce pays pour faire respecter les mesures de quarantaine, selon le gouvernement.
Le Liberia a quant à lui restreint les déplacements entre certaines provinces et la capitale, mais ces restrictions suscitent des craintes de pénuries alimentaires en raison de perturbations dans l’approvisionnement. Autre préoccupation : la menace de grève des travailleurs de la santé, qui ont dénoncé le manque de moyens et de matériel pour gérer les cas d’Ebola, ayant fait plusieurs morts dans leurs rangs.
A Monrovia, la situation est « catastrophique », a alerté vendredi Lindis Hurum, coordinatrice d’urgence au Liberia de Médecins sans frontières (MSF). Dans la capitale, une missionnaire congolaise est morte samedi de la fièvre hémorragique. Elle faisait partie de l’Ordre hospitalier de San Juan de Dios pour lequel travaillaient les religieux espagnols évacués jeudi du Liberia.
L’épidémie a aussi des conséquences politiques : la campagne pour les élections sénatoriales partielles au Liberia, qui devait démarrer le 12 août, a dû être reportée sine die. Signe de l’inquiétude grandissante, le Tchad a décidé de suspendre tous les vols en provenance du Nigeria voisin. Et la Zambie a interdit d’entrée les ressortissants des pays touchés.
La Mauritanie, où aucun cas suspect n’a été détecté pour le moment, a renforcé le contrôle sanitaire à ses frontières sud. Hors d’Afrique, l’Inde (1,25 milliard d’habitants) a annoncé avoir placé ses aéroports et ports en alerte.
JA