Présidentielle 2015: « Quoi qu’on en pense, Dadis a un réel poids politique… », reconnait Sidya Touré

L’ex-Premier ministre est formel : les communales doivent se tenir avant la présidentielle, et l’opposition a intérêt à faire front commun. Mais est-ce possible ?

Depuis que la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) a annoncé que le premier tour de la présidentielle était fixé au 11 octobre et les communales reportées à mars 2016, les leaders de l’opposition réclament à cor et à cri une inversion du calendrier électoral.

Ce que refuse catégoriquement Alpha Condé – « Vous me voyez accepter de devenir un chef d’État hors délais constitutionnels ? Le piège est un peu grossier… », confiait-il début mai à Jeune Afrique. Pour le député et ancien Premier ministre Sidya Touré, président de l’Union des forces républicaines (UFR) – deuxième formation d’opposition à l’Assemblée nationale (10 sièges sur 114) après l’Union des forces démocratiques de Guinée de Cellou Dalein Diallo (37 sièges) -, seule une intervention de la communauté internationale pourrait, peut-être, faire bouger les lignes.

 

Jeune Afrique : Pourquoi rejetez-vous le choix de la Ceni et du chef de l’État de maintenir la présidentielle en octobre afin de respecter les délais fixés par la Constitution ?

 

Sidya Touré : D’un côté, le pouvoir bafoue les lois et, de l’autre, quand ça l’arrange, il demande qu’on les respecte. Alpha Condé sait qu’il doit organiser les élections communales depuis cinq ans ! Les dernières datent de 2005. Fin 2010, le mandat des élus locaux a été prorogé sans que la Cour suprême, seule habilitée à le faire, ait été saisie. Puis ces élus ont été remplacés par des délégations spéciales nommées par le pouvoir, au sujet desquelles la loi est très claire : leur mandat ne doit pas excéder six mois. Les communales doivent donc se tenir rapidement. En réalité, le pouvoir ne veut pas discuter de cette question. Il essaie de gagner du temps pour qu’on ne puisse pas organiser les communales, tout en faisant passer l’opposition pour irresponsable parce qu’elle ne veut pas aller à la présidentielle.

 

Y a-t-il une chance de renouer le ­dialogue ?

 

Nous avons rencontré différents acteurs de la communauté internationale, parmi lesquels le représentant spécial de l’ONU pour l’Afrique de l’Ouest, Mohammed Ibn Chambas, dont nous attendons des propositions. En juillet 2013, cette même com­mu­nauté internationale nous avait fait signer un accord qui recommandait justement dans son annexe une inversion du calendrier électoral. Nous espérons qu’elle ne restera pas aveugle en constatant que rien n’a été fait.

 

L’opposition présentera-t-elle un candidat unique à la présidentielle ?

 

Autour de qui pourrait-elle se rassembler ? Les discussions sont en cours. Si rassemblement il y a, il doit être mûrement réfléchi et crédible afin de permettre une alternance en 2015, dont le pays a absolument besoin. Y parviendrons-nous ? On verra. Pour le moment, il ne faut pas personnaliser le débat. Le tout est de savoir si nous pouvons obtenir un large consensus pour battre Alpha Condé. Si la réponse est oui, alors la question de la personne censée incarner ce consensus se posera. Ce n’est pas encore le cas.

 

Que pensez-vous de la candidature, annoncée début mai, de Moussa Dadis Camara, l’ex-président de la transition ?

 

Dadis est un fils de ce pays. S’il a envie d’être candidat nonobstant les enquêtes judiciaires en cours sur le dossier du 28 septembre [2009], je n’y vois pas d’inconvénient ; les Guinéens trancheront. En revanche, si la justice le met en cause, la question se posera différemment. Quoi qu’on en pense, Dadis a un réel poids politique dans sa région natale, la Guinée forestière. Il faudra voir de quelle manière il peut contribuer à l’apaisement et l’inclure dans ce processus de consensus national que nous appelons de nos voeux afin de battre Alpha Condé.

 

In JA

 

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