Conakry Express réquisitionné: Alpha Condé veut-il décourager les investissements chinois en Guinée?
La décision par l’Etat guinéen de réquisitionner le train Conakry Express risquera-t-elle de provoquer un incident diplomatique entre la Guinée et la Chine? Même si les responsables en Guinée de GDC (Guinea Developpement Corporation), filiale de China International Fund, donnent la chance à la poursuite des négociations, des observateurs estiment que cela pourraient bien décourager les investissements chinois en Guinée qui portent sur plusieurs secteurs, notamment les mines, les transports, la construction, la santé et autres. Le gros investissement en jeu porte sur le Simandou que Chinalco s’est engagée d’exploiter après le retrait de Rio Tinto. Un projet qui a valu pourtant un déplacement au président Alpha Condé en Chine.
Kafoumba Diabaté, le chargé des relations extérieures de GDC, a expliqué lundi à la presse les conclusions du 8 mars au 5 avril 2016 de la deuxième phase des négociations portant sur la Convention d’Investissement et de remboursement et la Convention d’assistance technique au train Conakry Express.
Selon lui, constatant le manque de transport ferroviaire des passagers dû au démantèlement de la voie Conakry-Niger et dans le but d’atténuer l’immense déficit de transport public à Conakry , le ministère guinéen des Transports et China International Fund ont exprimé une volonté commune d’engager une véritable politique des transports qui s’est matérialisée par un contrat ayant pour objet la fourniture de matériels ferroviaires, services et assistance techniques nécessaires à l’usage, à l’entretien, à la gestion desdits matériels d’une part, et d’autre part la construction et la réhabilitation d’installations ferroviaires au bénéfice de l’Etat guinéen, par GDC Transports.
« Ce contrat a permis de lancer le projet « Conakry Express » dont les travaux ont commencé le 1er novembre 2009 et ont abouti à la fourniture des biens et services ci-après: cinq (05) locomotives de 5000CV/chacune, trois (03) wagons électriques de trois groupes électrogènes chacun, dix-neuf (19) voitures voyageurs de 118 places assises chacune, un lot de pièces de rechange, la construction de neuf (09) plates-formes pour passagers et d’autres infrastructures et bâtiments, un prêt financier pour assurer le fonctionnement des trains pendant douze (12) mois, la mise en place d’une assistance technique. Au terme des travaux de construction et de fourniture de matériel et dans le but d’assurer leur gestion, la Société Nationale des Chemins de Fer de Guinée (SNCFG) a été créée le 28 mai 2010 et le train Conakry Express a été lancé le 15 juillet 2010. Depuis le démarrage des activités en 2010 jusqu’à cette date des négociations, la Société CIF à travers sa filiale GDC TRANSPORTS finance en lieu et place de la République de Guinée, les frais de l’assistance technique et de fourniture de carburant, de lubrifiants et de pièces de rechange », confie-t-il.
Et la Société CIF dans le but de bénéficier du remboursement des montants investis, a soumis en mai 2014, au département des Transports deux (02) projets de conventions qui sont: une convention d’investissement et de remboursement des montants dus au titre de la livraison de matériels ferroviaires (locomotives, voitures-voyageurs et wagons électriques…), et de construction d’infrastructures; une convention relative à l’assistance technique de juillet 2010 à 2013 et qui continue à date.
« Ces projets de conventions ont été soumis par le Ministre des Transports à l’appréciation d’une Commission Interministérielle comprenant les Ministres ci-après: Ministre d’Etat, Ministre de l’Economie et des Finances, Ministre d’Etat, Ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Ministre Délégué au Budget. Cette Commission interministérielle s’est réunie en 2014 et en 2015 et a fini par mettre en place une Commission composée des cadres des quatre (04) départements pour entamer les négociations avec CIF. La première phase des négociations avec CIF a eu lieu du 2 au 9 juin 2015 à Conakry et les conclusions ont été transmises aux quatre ministres. En raison de l’existence de certains points qui nécessitaient d’une part la fourniture de pièces justificatives et d’autre part l’avis des organes de tutelle, une deuxième phase des négociations a été envisagée », explique-t-il dans ce document.
Et d’indiquer que sur la demande de CIF, la deuxième phase a eu lieu du 8 mars au 05 avril2016 à Conakry et a regroupé les représentants du Ministère de l’Economie et des Finances, du Ministère des Transports, de la Société Nationale des Chemins de Fer de Guinée (SNCFG), de la Société China International Fund (CIF) et de GDC TRANSPORTS.
Mais il a souligné que ce document de conclusions non encore signé qui n’a aucune valeur juridique vise à permettre d’une part, à la Commission interministérielle mise en place par l’Etat Guinéen et d’autre part, aux mandataires de CIF de rendre compte à leurs mandants des négociations menées et des résultats obtenus.
«En conséquence, en aucune façon, le contenu du présent relevé de conclusions ne sera utilisé pour imposer ou prouver une/des obligation(s) à la charge de l’Etat Guinéen, de la Société China International Fund (CIF) et/ou de la Société GDC TRANSPORTS », dit-il. En précisant que seule la convention d’investissement et de remboursement et la convention d’assistance technique ont une valeur juridique.
« CIF s’est rapprochée du département des transporteurs pour savoir où se situe blocage. Nous avons vu que rien ne marchait, rien ne bougeait. Après plusieurs tentatives de négociations, nous avons écrit plusieurs courriers, et d’autres qui venaient de la Chine, nous n’avons reçu aucune réponse. C’est ainsi que CIF a décidé d’immobiliser le train Conakry Express », détaille le sieur Diabaté.
« C’est avec une grande surprise que nous avons reçu le décret de réquisition du train alors que les négociations se poursuivent », dit-il. Affaire à suivre…
Amara Camara